Cet article risque d'être un peu désorganisé, c'est parce qu'il est le fruit de plusieurs semaines de réflexion.
Lorsque je suis tombée enceinte de Lulu, je savais déjà que je lui donnerai une éducation non-genrée. Je veux dire par là que je refuse les clichés sexistes et que je compte bien montrer à ma fille qu'elle est capable de faire aussi bien qu'un homme. De même pour mon fils qui aura les mêmes droits et devoirs que sa soeur, notamment en ce qui concerne les tâches quotidiennes. A l'époque, je me disais que le sexisme existait surtout dans les autres pays et qu'en France, nous étions beaucoup plus évolués sur la question.
J'étais bien naïve.
Tout a commencé lorsque j'ai appris que j'attendais un garçon. Dans la belle-famille, il y a deux filles en plus de Lulu, Teemo est le premier garçon, et voici comment mon beau-père a accueilli la nouvelle: "Enfin un garçon! Il va pouvoir les dresser." Ce sont plutôt mes cheveux qui se sont dressés sur ma tête et je n'ai rien dit. J'avais déjà entendu ce type de réflexion, je me suis habituée à les entendre appeler les filles les "pisseuses" ou les "pleureuses" en grinçant des dents. Pourtant, mon beau-père n'est pas du tout le type d'homme à rentrer à la maison et se contenter de poser les pieds sous la table, au contraire, il aide beaucoup sa femme et lui a toujours témoigné beaucoup de respect. Je me disais que ce n'était que des boutades et que j'arriverais à les corriger si nécessaire.
La dernière fois que nous les avons vu, j'ai réalisé que la tâche serait plus difficile que je ne le pensais. Alors que Lulu jouait avec le garage de sa cousine, ma belle-mère a dit: "Oh, Lulu aime jouer avec un garage, elle pourra jouer avec son frère!" ??? Parce qu'elle a besoin de son frère pour avoir accès à un garage (qui pour le coup appartenait à sa cousine)? Parce qu'ils n'auront pas d'autre activité ensemble? C'est quoi cette manière de cataloguer les jeux? Remarque, de la part d'une femme qui n'offre que des accessoires Hello Kitty, des petits poneys ou autres Zhu Zhu Pets à ma fille, il fallait s'y attendre (et Lulu a échappé à l'aspirateur parce que j'y suis farouchement opposée, ses deux cousines ont leur modèle réduit, elles). Mais ce n'est pas tout, c'est justement ce même jour que mon beau-père s'est cru malin en offrant à Teemo, 4 mois rappelons-le, un... pistolet. Il nous a avoué qu'il avait complètement craqué en le voyant et qu'il n'avait pu s'empêcher de l'acheter pour son petit-fils même s'il ne jouait pas avec.
Nous avons pris peur. Autant mon mari que moi. Le pistolet a fini dans les mains de Lulu et elle aime beaucoup jouer avec (même si ce genre de jeu violent me dérange un peu mais c'est en cours de réflexion car Piwix a joué des années à Counter Strike sans jamais se mettre à tirer sur le premier venu (on n'a pas d'arme à la maison, ça aide aussi)). Finalement, la partie sera sûrement plus difficile que prévu et même si je ne dis rien pour l'instant parce que Teemo est petit, ça ne passera pas si j'entends une réflexion du type: "Ce n'est pas bien de pleurer, Teemo, tu es un garçon, un garçon ça ne pleure pas!" (je le sens gros comme une maison). Je n'aime pas les conflits et j'ai peur de devoir y arriver si ça continue comme ça.
Du côté de ma famille, c'est beaucoup moins marqué. Même si le garçon était aussi très attendu, les jouets de Lulu sont diversifiés, surtout parce que j'étais moi-même une petite fille davantage intéressée par ses Transformers que par ses Barbies et que ma mère a toujours été très ouverte à ce sujet. Chez eux, c'est plutôt l'âge qui pêche, ils ont tendance à acheter des jouets destinés à des plus grands...
La catégorisation des jeux est un sujet encore très présent. Je me souviens avoir lu sur un blog une maman s'extasier devant son fils qui découvrait les voitures de son grand frère et qui disait que, finalement, "c'était bien dans les gênes". Il n'y a rien de plus faux. Il est prouvé que les enfants sont tout autant attirés par les poupées et les voitures, peu importe leur sexe, et cela ne présage en rien de leur avenir. J'adorais jouer aux voitures et je ne suis pas mécanicienne (je ne sais même pas changer une roue). Le problème est bien la continuité de ce type de clichés auxquels les gens ne font même plus attention.
Le sexisme m'avait aussi échappée jusqu'à présent en ce qui concerne les vêtements. Quand Lulu était toute petite, je piochais indifféremment dans les rayons filles et garçons, pas toujours différenciés pour les tout-petits d'ailleurs, et à part les robes, je ne voyais pas grande différence. A la limite, j'avais remarqué lors d'un printemps plutôt frais que les petits hauts filles étaient tous composés de petites bretelles à dentelles et qu'il m'avait fallu m'approvisionner chez les garçons si je voulais éviter que ma fille attrape la mort.
Je l'ai constaté une première fois à
Kiabi et cette semaine, alors que je cherchais de nouveaux pyjamas pour Lulu à Carrefour, j'ai dû quitter le rayon bébé pour le rayon enfant (ma petite fille grandit si vite <3) et là, je suis restée ébahie devant le rayon:
Le message envoyé aux petites filles est très clair: pour être une vraie fille, il faut être apprêtée. Un petit noeud dans les cheveux, un sac à main fashion et vous voilà une vraie star. Je passe sur le fait que tous les pyjamas sont roses ou violets, j'ai réussi à dénicher un Hello Kitty simple et une jolie Raiponce dans ce méli-mélo de messages sexistes. Je ne suis pas contre le rose et les paillettes, ni contre les princesses Disney (Belle ou Mulan sont de bons référents féminins selon moi), je suis contre l'endoctrinement des petites filles à qui on apprend que leur physique détermine leur valeur. Et après on s'étonne qu'à 10 ans elles s'habillent comme des jeunes filles de 16 ans! Quand je vois Minnie sur un pyjama taille 2-3 ans, je n'ai pas besoin d'aller chercher plus loin.
Et cet apparat est vraiment de trop. Combien de fois je me suis offusquée contre mon mari qui me balançait, de passage dans la salle de bains: "Beurk! T'es pas rasée sous les bras!" D'une, c'est l'hiver et je ne porte que des pulls donc je ne vois pas l'intérêt, et de deux, ce n'est pas parce que je ne suis pas rasée de près que je manque d'hygiène! Quel scandale de voir une femme venir au travail sans être maquillée, on s'empresse de dire qu'elle ne sait pas prendre soin d'elle, mais un homme qui vient avec une barbe de 3 jours, c'est sexy. Non mais franchement... Ca m'énerve.
Pour en revenir à nos pyjamas, je suis quand même allée voir dans le rayon garçon.
J'ai trouvé les messages beaucoup plus neutres. Il y a bien Spiderman et Gingka, des héros forts et courageux, mais dans l'ensemble, ça reste sobre. J'ai d'ailleurs pris le pyjama Mickey gris pour Lulu (j'aurais bien pris le Mario en haut à gauche mais il n'y avait pas sa taille!). Les garçons ont le choix de la diversité, de devenir celui qu'il ont envie d'être.
Et ce que j'ai pu constater par moi-même dans le quotidien, ce n'est qu'une brindille dans le monde sexiste qui nous entoure. Je suis régulièrement les blogs de
Sophie Gourion,
Antisexisme et
Kalista avec qui je découvre des choses qui me paraissent abracadabrantes, comme la blague sexiste et ô combien violente de
Seth MacFarlane lors de la cérémonie des Oscars ou la campagne de publicité pour le
salon du livre ancien. Une étude récente épingle d'ailleurs
la place de la publicité sexiste autour de nous. Je ne comprenais pas l'intérêt de la journée internationale des femmes le 8 mars dans un pays comme le nôtre, je le pensais davantage destiné aux femmes du Moyen-Orient qui doivent encore lutter pour avoir le droit de vote ou juste sortir dans la rue, mais je m'aperçois qu'il y a encore beaucoup à faire pour la cause des femmes dans nos contrées.
Le sexisme est encore bien présent dans notre société et je vais avoir fort à faire dans les années à venir. Surtout quand j'entends Lulu dire, au moment de sortir jouer au ballon: "Ballon! Garçon!". Grrr!